Du côté du web n° 23 du 9 juin 2011

L'optimiste forcené que je suis, tire quelques enseignements très positifs de la campagne FNE tellement décriée, au risque de détonner dans le concert bien-pensant actuel (Jean-Marie SERONIE dans la gazette du 17 mars)
Réponse très tardive : la campagne FNE m'a choqué et il a été normal que les professionnels répondent. Que n'aurait-on pas entendu s'ils ne l'avaient pas fait, sur le thème : "les paysans et les chimistes savent bien que tout ceci est vrai, et ils en ont honte". Il était indispensable de s'offusquer pour montrer qu'on n'était pas dans un débat serein avec des arguments normaux, il fallait laisser dans un coin de la tête du public qu'on était dans le choquant, l'irrationnel, la mauvaise foi. Répondre point par point aurait donné une valeur scientifique aux arguments exposés en image. Crier au scandale permettait de rabaisser la campagne au niveau de France-Dimanche (si cet hebdomadaire existe toujours ?).

Mais rien ne dit que cette stratégie, pour incontournable qu'elle soit, a atteint son but. Car, contrairement à ce qui est dit, il n'y a pas une très forte sensibilité et la demande de nos concitoyens aux biens publics. Ni une hyper sensibilité de notre univers professionnel agricole à la critique.

Car il ne s'agit nullement de critique, mais d'injure. Démontons le processus de manipulation : il y a, à la base, un raisonnement archaïque (primitif, infantile, irrationnel, holiste, en tout cas non rationnel) de l'être humain, attisé par des associations manipulatrices ; certains de leurs membres étant de bonne foi, restés dans l'irrationnel, d'autres membres plus rationnels étant de mauvaise foi (parce qu'ils ont tout compris mais ont des avantages à tirer parti de l'ignorance du peuple), et c'est cette in-intelligence qui est inquiétante et la manipulation qui est révoltante car injurieuse.

Chacun d'entre nous rencontre tous les jours des gens qui reprennent l'antienne antédiluvienne du "la nature a toujours raison", "l'homme corrompt tout ce qu'il touche", "on mange de plus en plus mal à cause de tous ces produits chimiques". Ces phrases irrationnelles sont naturelles et viendront toujours à la bouche de nos semblables de prime abord (c'est-à-dire avant de commencer à connaitre la réalité scientifique des choses). L'éducation en famille ou à l'école, l'information généraliste ou spécialisée sont là pour apprendre aux gens ce qu'ils n'ont pas à savoir spontanément. Que des gens qui contestent ce savoir proposent un vrai débat sur l'innocuité des OGM ou le réel danger des algues vertes, pourquoi pas ? On appellerait ça une critique. Mais laisser clairement entendre qu'un maïs OGM pourrait tuer alors qu'il est impossible de l'imaginer scientifiquement, c'est faire comme si la science n'existait pas, que ceux qui s'expriment en tant que scientifiques n'avaient ni légitimité, ni sincérité, que les ONG avaient un savoir immanent qui ne se discutait pas. Bref, comme dans toute paranoïa, c'est se présenter comme le seul qui sache face à tous les autres qui sont des méchants qui vous veulent du mal. Cette présentation des choses subliminalement paranoïaque a de quoi révolter puisque c'est une manière de balayer l'intelligence des scientifiques, et de rejeter l'agriculteur dans le camp des malfaisants. Le travail de l'agriculteur et le raisonnement du scientifique (les deux pouvant être une seule personne) sont négligés au sens de compter pour zéro. On vous réduit à néant, ce qui est une injure d'une violence extrême.

Il faut donc s'offusquer pour bien montrer qu'on ne considère pas que la campagne est sur le plan de la critique, mais sur celui de l'injure.

Mais pas trop, effectivement, pour ne pas entretenir la campagne de communication / dénigrement.

A qui la faute si on en arrive là ? Ce n'est pas aux paysans, ni au CNRS de se justifier tous les jours par de coûteuses campagnes de communication. La manipulation ne marche que parce que l'opinion publique est dans un état d'ignorance qui se prête à toutes les manipulations.

A mon avis, la faute en revient aux acteurs de l'éducation (l'école : que font les profs ?), mais surtout de l'information de masse : que fait le "service public" de la télévision ? Justement, il fait l'exact contraire de ce pourquoi on y met de l'argent public. Il diffuse des documentaires douteux et désinformateurs sur toutes ses chaines : France 2, France 3, France 5, Arte !

Après les grandes manifs antinucléaires des années 70, EDF a compris que défendre sans arrêt le nucléaire ne lui apportait que des contradicteurs et ne servait à rien vis-à-vis de la population lambda. La mort de Vital Michalon en 77 à Creys-Malville l'a incitée à se taire et à laisser s'exprimer tout le monde sauf elle, ce qui est toujours le cas aujourd'hui. L'effet de serre, puis Areva et quelques succès d'exportation font qu'aujourd'hui le débat est dans la société civile, entre scientifiques et politiques, et c'est mieux comme ça.

Il me semble qu'il en est de même pour l'agriculture : ce n'est pas à la FNSEA de se défendre, elle sera toujours considérée comme non crédible car intéressée au résultat du changement d'opinion. C'est à la société civile, et en particulier à ceux qui ont un savoir de défendre notre agriculture. Et surtout France Télévision, qui est au-dessous de tout jusqu'à présent.
Contact : Yves EGAL
Mél : yves.egal(a)sfr.fr

Mais le lobby antinucléaire me fait rire : il ne faut ni gaz de schiste, ni nucléaire, ni charbon, ni barrage hydro-électrique (on l’a vu avec l’aménagement de la Loire par exemple)… Dans chacun des cas cités plus hauts, tout peut se discuter, mais au total, c’est cette ignorance de la réalité de nos besoins, nous 7 milliards d’humains, qui me paraît insensée (Gazette du 19 mai)
La réponse de GW ne me fait pas rire, elle me fait pleurer ! Les "anti-nucléaires" sont des citoyens ordinaires, ni plus, ni moins cons, que les citoyens médians. Ils connaissent comme tout le monde, les projections des besoins en matière énergétique et c'est bien pour cela que l'axe premier de leurs engagements vise les économies d'énergies, pour infléchir la courbe.
Les "anti-nucléaires" ne sont pas des arriérés mentaux qui dédaignent le progrès scientifique. Ils sont, dans leur majorité, de formation scientifique et comme tout bon scientifique, ils intègrent le doute dans leur réflexion et la notion de la balance +/- d'une innovation. Surtout, ils attachent une attention particulière à l'expérimentation face à l'aveuglement des scientistes qui font, volontiers, l'impasse de l'expérimental, ce qui me semble fort peu scientifique.
C'est à l'évidence le cas pour les gaz et pétrole de schistes dont le bilan est catastrophique en matière de préservation de la ressource en eau. Or chacun sait que, dans l'ensemble des défis que l'humanité a à relever pour sa survie, le problème de l'eau passe bien avant le problème de l'énergie. Ce n'est pas à des agronomes que je devrais faire la démonstration.
Pour ce qui me concerne, j'ai mis en place une mini-centrale photovoltaïque de 133 m², en panneaux solaires de production française, dont la production profite du dérèglement climatique puisque je dépasse de plus de 10%, mes objectifs de production!
Anti-nucléaire primaire, je choisis des productions d'énergie décentralisées, qui s'intègrent dans une perspective de développement local et redonnent au monde rural des capacités financières d'adaptation économiques et de sauvegarde du bâti rural.
Contact : François BRAILLON
Mél : majofranc(a)wanadoo.fr

Ma réponse (GW) : Et vous pouvez remercier chaleureusement EDF (et surtout M. Borloo) qui vous a acheté cher l’électricité que vous produisez. Et ceci n’est en rien un reproche ! Je crois vraiment que vous avez pris une belle initiative. Je n’ai rien contre le solaire, tant qu’on en me dit pas que c’est la solution miracle et écologique à nos besoins en énergie.